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Rencontre

Miguel Bonnefoy à Atlantide

Miguel Bonnefoy à Atlantide Rencontre

Prix Femina et Grand Prix du Roman de l’Académie française pour Le rêve du jaguar (édition Rivages), Miguel Bonnefoy est l’un des invités phares du festival Atlantide.

Rencontres :
Samedi 8 mars à 11h, médiathèque Lisa Bresner ;
dimanche 9 mars à 12h et 16h, le Lieu Unique.

Calendrier Dates :
  • Dimanche 9 mars 2025 à 12h00
  • Dimanche 9 mars 2025 à 16h00
Localisation Lieu : Le Lieu Unique, quai Ferdinand-Favre
44000 Nantes
Prix : Gratuit
Site web Site : atlantide-festival.org...
L'interview

L'interview

Miguel Bonnefoy : « J’écris des livres qui sortent de mon cœur et de mon ventre »

Prix Femina et Grand Prix du Roman de l’Académie française pour Le rêve du jaguar (édition Rivages), Miguel Bonnefoy est l’un des invités phares du festival Atlantide. Auteur au style foisonnant qui aime narrer de grandes destinées, le Franco-Vénézuélien parle un peu comme il écrit. La preuve.

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Le français est la langue qui m'a appris à structurer ma pensée

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Votre langue maternelle est l’espagnol. Pourquoi écrire vos romans, dont les histoires se situent plutôt du côté de l’Amérique latine, en français ?

Je suis fils de diplomate. J’ai donc été ballotté de pays en pays pendant toute mon enfance, et j’ai étudié dans des lycées français à l’étranger. Ça m’a permis d’avoir une continuité de français dans une vie fragmentée par des langues différentes. C’est sans doute la raison pour laquelle, lorsque je me suis mis à écrire sur le Venezuela et le Chili, il m’a été évident que ce serait en français. C’est la langue qui m’a appris à structurer ma pensée. 
 

C’est ce que dit l’un des protagonistes du Rêve du jaguar : la lecture peut être une attache plus qu’une évasion…

On dit souvent que lire c’est voyager. C’est vrai, mais pour moi qui ai grandi avec une vie qui n’était que voyages, c’était plutôt l’inverse. Je retrouvais de vieux amis invisibles dans mes livres : des royaumes immuables et immobiles qui me rassuraient beaucoup, alors que je manquais de repères.
 

Le rêve du jaguar raconte les destinées incroyables de votre famille : votre grand-père recueilli enfant par une mendiante et qui deviendra, après avoir travaillé dans un bordel, l’un des plus grands médecins du Venezuela ; votre grand-mère, qui fut la première femme médecin du pays… Récit ou légende familiale ?

C’est absolument un récit familial ! J’ai des preuves matérielles, notamment deux classeurs avec des coupures de journaux sur mes grands-parents, qui étaient des figures publiques au Venezuela. Concernant ce bordel, qui s’appelait le Majestic, c’était plus difficile d’avoir des infos, mais j’ai retrouvé un vieil oncle sur WhatsApp. Il m’a donné des détails si aiguisés que je lui ai demandé comment il savait tout ça. Il y a eu un long silence puis il m’a dit : on m’a raconté. On ne connaît jamais les hommes ! 
 

Vous avez déclaré, en recevant le Prix Femina, que vous attendiez ce prix depuis 10 ans…

Les dames du Femina m’ont mis sur leur liste dès mon premier roman. Et je me suis toujours dit que je n’aurai jamais le Goncourt, n’osant pas aspirer à quelque chose d’aussi grand. J’ai continué à faire mon travail et le Femina a continué à me suivre à chaque publication. Ça m’a donné envie d’y croire. Je me suis permis le luxe de rêver à ça et, finalement, c’est arrivé. Comme quoi, quand on désire quel­que chose avec beaucoup de force, on finit par en attirer la réalisation.
 

Le rêve du jaguar a aussi reçu le Grand Prix du Roman de l’Académie française. Est-ce à dire que vous êtes un écrivain académique ?

Non, mais en apportant un livre de plus dans le grand océan des livres merveilleux qui existent, je participe peut-être à mon humble mesure au patrimoine culturel français. Et je ne me situe pas non plus comme un écrivain iconoclaste, qui chercherait à casser la langue à la façon des surréalistes, des dadaïstes. J’écris des livres qui sont d’abord honnêtes, qui sortent de mon cœur et de mon ventre. 
 

Il y a dans la manière dont vous enrobez les faits une dimension conte, voire biblique. Vous décrivez des passions folles, de grandes vocations, avec ici et là des touches de magie. D’où ce goût du baroque vous vient-il ?

Sans doute d’une littérature latino-américaine et caribéenne, des livres de García Márquez, de Carlos Fuentes... Et aussi d’une littérature française un peu épique, comme celle de Victor Hugo. C’est quelque chose qui m’a beaucoup bercé : l’intensité, la majestuosité, les grands destins. Je me rends compte que je suis moins dans une littérature des petites choses, des grands silences, des non-dits dans les familles…
 

Votre style contraste avec l’essentiel de la littérature contemporaine, souvent plus minimaliste. Juste avant, je lisais un roman de Patrick Modiano… Le jour et la nuit ! 

D’ailleurs, vous n’allez pas me croire… Le jour où j’ai reçu le prix de l’Académie, je buvais un café et au moment de payer, ma carte bleue ne passe pas. Une dame me dit : « M. Bonnefoy, je serais très heureuse de vous offrir ce café. » Elle ajoute : « Je croise les doigts pour le prix, toutes les femmes de France sont derrière vous. » Surpris qu’on m’ait reconnu, je me dirige vers l’Académie et dans la rue, je croise Patrick Modiano ! 
 

Non ?

Si. Je vais lui dire que je suis un grand admirateur. Il me remercie mais semble dans l’embarras. Ne sachant comment me défaire de cette situation, la seule phrase qui m’est venue à l’esprit est : « M. Modiano, toutes les femmes de France sont derrière vous ! » Il a dû se demander qui était cet hurluberlu… Une heure plus tard, on me donnait le prix, le même qu’avait reçu Modiano en 1972.



Propos recueillis par Matthieu Chauveau
Crédit photos : © Aurélie Lamachère - Leextra - Maison Deyrolle - éditions Rivages
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